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Laïcité à plusieurs vitesses (suite)

Publié le 14/01/2013, dans Les chroniques de La Semaine | par La Semaine du Pays basque
Laïcité à plusieurs vitesses (suite)

Je ne me doutais pas que mon dernier « Bloc-Notes » déchainerait une telle avalanche de réactions, les unes m’appuyant, les autres baignant dans une véritable soupe aux aigreurs. Cette dernière fleure bon les sites consacrés à « la laïcité, portant un regard critique sur la société » ou les rancœurs d’un ancien « acteur » malheureux de notre hebdomadaire.

Ainsi, C. J. me situe volontiers dans « la famille de ceux qui allument les bûchers (…) et m’accuse de « distiller sans preuves mon poison et de salir notre journal ». Pas moins !
Tout cela pour avoir constaté dans ce « Bloc-Notes » incriminé que « les fêtes de la Nativité ramènent chaque année leur lot de mise à l’écart volontaire des fondements les plus authentiques de notre civilisation européenne, en premier lieu de nos millénaires racines chrétiennes. Une négation souvent, hélas, accompagnée de profanations diverses de nos églises et de nos lieux les plus sacrés »…
En réponse à ce distingué correspondant, je réitérerai mes commentaires parus le 25 mai dernier sous le titre « Christianophobie, quand tu nous tiens », à propos la présentation du dessin animé « Gartxot » censé pourfendre les méfaits de la religion au XIIe siècle, époque des « obscures profondeurs de la christianisation » quand l’Eglise manifestait « l’impérieuse volonté de réduire les cultures différentes à néant et de soumettre les peuples libres ». … Je rappelais alors que cette « bouleversante description des méfaits de la religion » au Pays Basque aurait mieux fait de s’exercer - tout comme les indignations de C. J. - contre les exploits de la révolution (qui a déporté la population labourdine en 1794) et ceux des « hussards noirs de la république » (qui ont combattu sans pitié l’euskara à l’école)... Alors que beaucoup de curés avaient maintenu, envers et contre tout, l’usage de la langue basque dans les prêches, le catéchisme et, plus tard, dans la liturgie (grâce aux Bénédictins de Belloc). Sans compter tous les religieux qui ont participé à la sauvegarde du vocabulaire basque qui se perdait et de la linguistique (chanoine Lafitte), des coutumes et de l’anthropologie (abbé Barandiaran) de la musique et des chants (Père Donostia), l’action culturelle en faveur du souletin (abbé Roger Idiart), et combien d’autres depuis des siècles ! Encore aujourd’hui, il suffit d’assister à la messe dominicale dans un village d’Amikuze pour s’immerger dans un bain d’euskara. Et de lire « Herria » : fondé par le chanoine Lafitte et maintenu à bout de bras pendant des décennies par l’Abbé Larre, il est encore aujourd’hui, dans nos provinces du Nord, le seul hebdomadaire entièrement édité en langue basque. Quant aux abbés de Roncevaux qui sont chargés de tous les péchés du monde (dans « Gartxot »), on semble avoir oublié que les religieux navarrais étaient à l’origine de la plantation du vignoble d’Irouléguy dans leur prieuré du même nom. Mais peut-être, mon honorable correspondant préfère-il à notre bon vin basque quelque alcool dur frelaté ou, mieux, des salles de shoot comme le suggèrent à l’occasion quelques (basses) officines « libre-pensantes » ? C. J. me situe volontiers dans « la famille de ceux qui allument les bûchers ». Je lui rappellerai à ce sujet que ceux qui ont été allumés en 1609 pendant les procès dits de sorcellerie en Labourd étaient dus non pas à l’Eglise ni à l’Inquisition mais bien à un magistrat d’origine basque du Parlement de Bordeaux (Rostéguy – de Lancre), sans doute, entre autres, afin de détourner les pêcheurs basques de la traite des fourrures au Canada, concurrente du monopole que voulaient y imposer les nouveaux-venus de France, encouragés par Henri IV. Et ces « bûchers » ont pris fin grâce à l’intervention auprès du roi de l’évêque de Bayonne, Bertrand d’Echaux… Je rappellerai également à C. J. qu’actuellement, le nombre de Chrétiens persécutés dans le monde oscille entre 100 et 150 millions d’âmes, chiffre en hausse constante qui fait du christianisme la religion la plus persécutée. D’après les dernières statistiques, « un chrétien meurt toutes les 5 (cinq) minutes » alors que « sur 131 pays de culture chrétienne, il n’y en a pas un seul où la législation sur la liberté religieuse laisse à désirer ».

D’ailleurs, parfois le laïcisme est pire que l’islamisme… Ainsi le président égyptien Mohammed Morsi vient de présenter au patriarche Tawadros II et à la communauté copte ses vœux de joyeux Noël. Il avait envoyé un représentant officiel, le diplomate (et ancien porte-parole d’Al Azhar) Mohammed Rifaa El-Tahtawi à la messe de Noël célébrée par le patriarche en la cathédrale Saint-Marc du Caire dans la nuit du 6 au 7 janvier.
Ce n’est pas en France qu’on verrait ça… En France où le Chef de l’Etat, dans un message posté sur le site de l’Elysée, « souhaite que cette fête du pardon, du partage et du souci de l’autre, contribue à la concorde, dont notre Nation a tant besoin »… Rassurez-vous, pas pour le Noël chrétien, mais « à l’occasion de ses vœux de bonheur, de santé et de réussite adressés aux musulmans de France pour l’Aïd-el-Fitr, qui consacre la fin du mois de Ramadan ».

En précisant dans le même message, sans sourciller, que « la laïcité, qui assure la liberté de conscience comme elle garantit la liberté religieuse, demeurera indéfectiblement la règle de notre République » (http://www.elysee.fr/communiques-de-presse/article/message-du-president-de-la-republique-a-la-communaute-musulmane-a-l-occasion-de-la-fete-de-l-aid-el-fitr/ ). En revanche, ce fut « silence radio » pour les chrétiens, à Noël…
Je persiste et je signe : à cette fausse laïcité, je préfère, en matière de « philosophie de la vie », l’heureuse – et pimentée - devise des Ezpeletar qui ont gravé dans la pierre : « Euskaldun, fededun ta biperdun » !

10 COMMENTAIRES »
Par david.weber
Le 17/01/2013 à 20h07
@ Alexandre de La Cerda « N'en déplaise à David Weber, les « icônes » laïcistes de la fin du XIXe siècle, ceux-là mêmes qui préparaient les fameuses lois de 1905 (Séparation de l’Eglise et de l’Etat, ayant mis la France, particulièrement le Pays Basque, en ébullition), les Clemenceau, Waldeck-Rousseau et autre « petit père » Combes, », écrit M.de la Cerda. On sourit une nouvelle fois devant l'éclatante méconnaissance de M. de La Cerda quant à sa connaissance de l'histoire de notre belle France, de la laïcité et de la loi de 1905 en particulier. Car d'abord, jamais, au grand jamais, Clémenceau ou Waldeck Rousseau ne participèrent à l’élaboration de la loi de 1905. Le lecteur pourra facilement le vérifier en consultant le document qui suit à partir du paragraphe intitulé : « 7 juin 1902 : Constitution du cabinet Combes » http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/eglise-etat/chronologie.asp Du reste, c’eut d’autant plus difficile, pour Waldeck Rousseau, de participer à l’élaboration de la loi de Séparation qu’il fut gravement malade, à partir de 1902, et qu’il est mort six mois, au moins, avant le début de l’examen de la loi aux parlements… http://fr.wikipedia.org/wiki/Pierre_Waldeck-Rousseau M.de la Corda confond « simplement » le créateur de la loi de 1091 portant sur les associations avec les parents de la loi de 1905 que furent Jean Jaurès, Francis de Pressensé et Aristide Briand. Ensuite, M. de la Cerda, on ne doit pas parler de "Séparation de l'Eglise et de l'Etat "mais de "Séparation des Églises et de l’État". Le pluriel est important. Ce terme est à prendre dans un sens générique d'organisation religieuse, puisque la loi sépare le culte israélite de l'état, tout comme les cultes protestants luthérien et réformé et le culte catholique. Il aurait été plus judicieux de parler de la séparation des cultes et de l'état mais on ne refait pas l’histoire. Dans la loi elle même, il est question des cultes et non des Églises. N’hésitez pas, M de la Cerda, à continuer de parler de la troisième République, vous n’allez pas être déçu … La place m’est heureuse de vous y avoir rencontré, M de la Cerda.
Par Alexandre de La Cerda
Le 17/01/2013 à 16h52
N'en déplaise à David Weber, les « icônes » laïcistes de la fin du XIXe siècle, ceux-là mêmes qui préparaient les fameuses lois de 1905 (Séparation de l’Eglise et de l’Etat, ayant mis la France, particulièrement le Pays Basque, en ébullition), les Clemenceau, Waldeck-Rousseau et autre « petit père » Combes, n’opéraient guère cette savante distinction que vous évoquez. D’ailleurs, en 1891, à propos de la première représentation de sa pièce « Thermidor » dans laquelle Victorien Sardou dénonçait les horreurs de la Révolution en attaquant Robespierre et la Terreur, pièce que Clémenceau fera interdire presqu'immédiatement, les débats du 29 janvier à la Chambre des députés sont édifiants. http://www.assemblee-nationale.fr/histoire/Clemenceau_1891.asp « ...Et maintenant, si vous voulez savoir pourquoi, à la suite de cet événement sans importance d'un mauvais drame à la Comédie Française, il y a eu tant d'émotion dans Paris, et pourquoi il y a à l'heure présente tant d'émotion dans la Chambre, je vais vous le dire. C'est que cette admirable Révolution par qui nous sommes n'est pas finie, c'est qu'elle dure encore, c'est que nous en sommes encore les acteurs, c'est que ce sont toujours les mêmes hommes qui se trouvent aux prises avec les mêmes ennemis (…) Nous n'avons pas changé. Il faut donc que la lutte dure jusqu'à ce que la victoire soit définitive ». Le même Clémenceau, toujours au sujet de la pièce de Victorien Sardou, déclara aussi : « J'approuve tout de la Révolution : j'approuve les massacres de septembre où, pour s'éclairer, la nuit venue, les travailleurs plantaient des chandelles dans les yeux des morts. J'approuve les noyades de Nantes, les mariages républicains où les vierges accouplées à des hommes, par une imagination néronienne, avant d'être jetées dans la Loire, avaient à la fois l'angoisse de la mort et la souffrance de la pudeur outragée. J'approuve les horreurs de Lyon, où l'on attachait des enfants à la gueule des canons, et les égorgements de vieillards de quatre-vingt-dix ans et de jeunes filles à peine nubiles. Tout cela forme un bloc glorieux et je défends qu'on y touche. Je défends que, sur un théâtre qui dépend de l'Etat, un dramaturge illustre vienne, après plus de cent ans révolus, prononcer une parole de pitié qui serait un outrage aux mânes augustes de Robespierre et de Marat ». Souffrez pourtant, cher David Weber, que le signataire de ces lignes – et sans doute plus d’un de ses lecteurs – contredisent une « si mâle assurance » ! Alexandre de La Cerda
Par david.weber
Le 17/01/2013 à 14h06
Moral "Le point Godwin désigne le moment où, selon une règle maintes fois vérifiée, une discussion sur Internet finit toujours par invoquer la Seconde Guerre mondiale. En France, on vient d’inventer un nouveau point Godwin : la référence à 1789 (cf Mesdames Deneuve et Parisot), la Révolution française et ses coupeurs de têtes. Seulement voilà, ceux qui y font référence ont du sécher les cours d’histoire. Car voilà donc nos malheureux laïques qui ne sont plus (seulement) des marxistes le couteau entre les dents (si, si, certains le pensent réellement), mais carrément des sans-culottes, des guillotineurs, des Robespierre en herbe. Peut-être, Alex, avant de crier à « 1789 » et d’y amalgamer ses critiques sur la laïcité qui se résument par : « Relevez au passage que son bouc émissaire principal est avant tout l'Eglise Catholique. », ferait il bien de réviser sa « Révolution française », à commencer par ce refrain repris par la France populaire pour le premier anniversaire de la prise de la Bastille, en 1790 : « Ah ça ira, ça ira, ça ira, les aristocrates à la lanterne, Ah ça ira, ça ira ça ira, les aristocrates on les pendra. » Le point 1789 fait rire. Il est aussi le révélateur d’un état d’esprit qui fait identifier ses auteurs aux nantis de l’époque révolutionnaire dont ils partagent leurs valeurs.
Par Alex Moral
Le 17/01/2013 à 11h52
Et voilà, la litanie des méchants catholiques, quand je vous disais que la sainte laïcité prétendait s'imposer comme religion ! Relevez au passage que son bouc émissaire principal est avant tout l'Eglise Catholique. Sachez que les pires massacres jamais commis en France l'ont été par la République, puisque vous aimez vous plonger dans les pages sombres du passé. La révolution française, sa terreur, le massacre des Vendéens, qui inspirèrent sanguinairement les épouvantables révolutions russe et chinoise avec leurs dizaines de millions de morts. Bas les masques David, balayez donc devant votre porte !
Par david.weber
Le 17/01/2013 à 10h30
Moral "La laïcité n'en déplaise à certains n'est pas en but en soi. ", affirmez vous. Il a des vérités qui tombent sous le sens et qui ne s’en remettent pas ! Aux chiottes les pogroms contre les juifs et les cathares pendant le moyen-âge. Aux oubliettes les croisades, les guerres de religion du 16ième siècle et celle de trente ans au 17ième siècle. A la poubelle Jean Huss, Galileo Galilée, Giordano Bruno, Etienne Dolet, le chevalier de la Barre. On s’en cogne des persécutions des protestants sous l’ancien régime alors qu'on chantait des Te Deum dans les cathédrales. L’affaire Dreyfus et des massacre de juifs en Afrique du nord qu’elle a entrainés, itou… Désormais, pour certain, ce sera extrêmement simple : on fera un tri écologique, dans ce qui était jusqu’alors considéré comme religieux. Si c’est du religieux bien « d’chez nous », traduisez catholique, alors c’est du patrimoine et on peut y mettre plein de fric, le valoriser à tout va, voire le réintroduire dans la sphère publique. Si c’est du religieux qui sent l’ailleurs, entendez par la tout ce qui n’est pas catholique, ça ne serait pas politique, des fois ? Si, bien sûr ! Aller ouste, du balai…
Par Alex Moral
Le 16/01/2013 à 20h45
La laïcité n'en déplaise à certains n'est pas en but en soi. On pourra toujours ânonner laïcité, laïcité, elle reste un simple outil. La convivialité, comment vivre ensemble, oui. Et dans ce domaine la religion catholique a toujours été à l'avant-garde. Alors ce n'est pas cette insipide nouvelle religion de simplets qu'est la "sainte laïcité" qui pourra s'y substituer de sitôt. Et encore moins avec des laïus aussi laborieux qu'ennuyeux. Merci M.de la Cerda de nous cultiver avec ce joyeux panache qu'on vous connaît, nous attendons la suite avec impatience !
Par david.weber
Le 16/01/2013 à 19h48
Vous avez raison, M. de la Certa, la laïcité est à plusieurs vitesses comme la modération de ce journal, du reste... Petit rappel à M. de la Certa, chroniqueur et trissotin de la laïcité : les communes sont propriétaires des églises catholiques, et l’État des cathédrales, car il n’a pas été possible de les attribuer, en 1905, à des associations catholiques que Rome se refusait de constituer (encyclique Gravissimo officii). La conséquence de cela, c’est que les autres cultes, anciennement concordataires, doivent supporter l’entretien des bâtiments qui leur sont revenus car ils ont accepté la loi contrairement aux catholiques pour qui l'entretient des bâtiments cultuels est pris en charge par les fonds publics... Enfin, cerise sur le gâteau, Il aura fallu 54 ans pour que le Vatican accepte la laïcité à la française grâce aux accords accords Briand/Cerretti... Cher M.de la Certa, le corset du vocabulaire du vocabulaire ne remplacera jamais la colonne vertébrale d'une pensée bien ordonnée et d’une bonne connaissance de l’histoire de la laïcité et des lois qui la régissent. Pensez donc à lire les ouvrages sur la laïcité de Jean Baubérot, Emile Poulat, Jacqueline Lalouette, Alain boyer, Maurice larkin et tourner cent fois votre plume avant d’écrire de sombres c…, contre vérités, voulais je dire.
Par PATRICK EICHE
Le 15/01/2013 à 12h43
etant plongé en ce moment dans le livre du chanoine PIERRE NARBAITZ quand les basques avaient des rois NABARRA ( 1978) aux alentours de l an 1000 deja le royaume de pampelune avant d etre le royaume de navarre qui englobait tout le pays basque se batait contre ses voisins venus du sud les barbares pour defendre ce christianisme relion de paix et d amour dont nous avons herité j usqu a aujourd'hui ...... MERCI ALEXANDRE
Par Michel de Vogüé
Le 14/01/2013 à 17h42
Comme toujours, magnifique plume! Le fonds doit sans doute être trop compliqué à dire par l’intelligentsia du Fbg St Germain, Cognacq Jay et autres places du Temple médiatiques où ne s’exprime pas qui veut…Courage, continuez, l'étau se déserre grâce à vous.
Par Philippe Leduc
Le 14/01/2013 à 17h27
Ce "papier" est digne d'être lu et commenté partout où l'on oublie l'histoire de nos Régions ...Parlons du génocide Vendéen!!! Destructurer notre société par le biais de la laïcité et de la soumission de la majorité à la plus infime minorité au nom de la non-discrimination ,tel est semble-t-il le seul objectif clair de nos actuels gouvernants!
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